e-mandala

Ou l'universalité, l'intemporalité et la force d'une forme.
De retour de Lhassa au printemps 2007, de cet incroyable point d'énergie
physique et mental (acupuncture terrestre selon notre ami Ko-Nakajima),
où malgré mon statut de touriste "accompagné" j'avais pu - entre autre-
faire des portraits réjouissants - c'était juste un an avant les émeutes sanglantes
de 2008 - mais sans avoir l'opportunité de les faire "renommer" par un poète
tibétain (selon le principe de tous mes portraits d'humanité), je me devais
de les célébrer..
Mais comment? Et de plus en essayant d'éviter tous les clichés que le simple mot
Tibet appelle dans notre imaginaire occidental.
Alors de retour à Paris, j'ai arpenté très lentement la salle des mandalas du musée
Guimet - au 6e siècle avant JC, Shakyamuni, le Boudha historique, aurait conçu
le 1er mandala dédié au maître du temps, Kalachakra, en dessinant un parcours
de couleurs qui retraçait sa propre progression hors du monde des phénomènes
et vers l'état de l'Eveil - et je me suis souvenu de cette phrase de François Cheng
"L'image dans le tradition chinoise est la rencontre de l'esprit de l'homme avec
l'esprit du monde" dont je venais de lire une belle anthologie de poésie
de la dynastie Tang - 7e/9eme siècle après JC - durant laquelle se sont construits
les premiers liens politiques et culturels entre la Chine et le Tibet..
Le déclic s'était fait: installer mes 52 portraits dans un e-mandala avec un poème
Tang et oeuvrer à une petite série dédiée aussi bien à internet qu'à
une vidéo-projection installation.
Hélas, ce processus a été cruel comme le dernier poème Tang:
j'ai réalisé le 4eme mandala au moment même des émeutes de 2008.
Une bonne galerie de Pékin m'a depuis sollicité à la vue de mon site
mais ayant ensuite découvert les mandalas.. a coupé tous les liens.

https://lobstein.art/mandala.htm

e-jin-ti-shi (poème de style nouveau, dynastie Tang VII-IXe siècles)
e-haïkaïs (chants d'amour du VI eme dalaï-lama, Tsangyang Gyatso, 1683-1706)

Le 27/05/2012 deux jeunes moines se sont immolés devant le grand temple Jokhang.
Les trentièmes depuis un an dans le grand Tibet, les premiers à Lhassa. Sur cette place
même où j'avais fait le portrait de quelques uns d'entre eux.. Sidération.
Alors honorer deux poèmes anonymes évoquant ces sacrifices trouvés sur le web
https://www.lobstein.art/imm1b.htm
et puis ruminant notre impuissance collective face à la politique de répression accrue depuis 2008
de l'état chinois, radicalement intransigeant à toute velléité d'affirmation culturelle et d'autonomie, je suis allé consulter un rayon de poésie tibétaine au Phénix, la meilleure librairie.. chinoise parisienne. Divine surprise, j'y ai découvert sous le titre de "l'abeille turquoise" une édition
bilingue de chants d'amour du VI eme dalaï lama. "Etrange saint homme, iconoclaste jusqu'au souffre, qui renonce à ses voeux de moine, garde les cheveux long et semble préférer le tir à l'arc à la récitation de mantras… Poète d'aventures, à la fois sensuelles et spirituelles, entre transparence de la méditation et vertige du désir, entre poétique corporelle et érotique verbale.
Rêveur rebelle à toute forme de commandement, Tsangyang Gatso mourut à 33 ans sans doute
assassiné. Parmi tous les dalaï-lamas, il est le seul dont les cendres ne soient pas conservées
au Potala."(Zéno Bianu, le traducteur)
Alors me remémorant ces fiers et beaux visages de jeunes femmes et hommes aux cheveux noirs jais et longs tenus par un coquillage ocre ou sous un chapeau de.. cow-boy, je me suis replongé
dans toutes ces images faites en 2007 du train Pékin-Lhassa puis à Lhassa
pour un nouvel hommage conjuration sous forme de 26 haïkus offerts à l'océan web.
(3 jin-ti-shi tangs, 23 haïkaïs de Gyatso)

https://lobstein.art/PL1.htm

Sarcasme de la dernière actualité: dimanche 8 Juillet 2012 ont débuté les travaux prés de Lhassa
d'un immense "parc touristique et culturel", "nouveau point de repère pour l'industrie touristique tibétaine", qui, à coûts égaux à ceux du Disney parc de Shangaï, entre autres spectacles impressionnants, glorifiera les aventures de Wencheng, princesse Tang envoyée en 641,
à l'âge de 16 ans, par son père l'empereur Tauzong, visiter, à plus de 3.000 km, le Tibet
et son souverain Songtsen Gampo. Celui-ci l'épousera. Elle vécut quatre décennies au Tibet, même après le décès de son mari. Selon l'agence Chine Nouvelle "Wencheng a grandement contribué à l'amitié entre Hans et Tibétains. Les Tibétains s'en souviennent et l'aiment toujours."
A ce jour, plus d'une centaine de nonnes et moines et civils se sont immolés plus les premiers condamnés à mort par la justice chinoise pour "incitation au suicide".

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