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Gardians et Indiens..
Fils du Soleil

 

 

 

Une voiture s’arréte devant un panneau annonçant les “Saintes Maries de la mer”. Un grand indien américain, archétypal avec son chapeau et ses longs cheveux noirs, en est sorti une carte à la main et, s’appuyant à la barrière d’un corral de chevaux de promenade, demande son chemin au gardian présent alors que deux gitanes, se dirigeant vers la ville à pieds, le fixent, curieuses.

Première scène d’un récit où il s’avère qu’une mythologie américaine mariée aux rêves d’un marquis provençal donne naissance à un imaginaire et une tradition camargaise.


Lorsque Buffalo Bill avec ses cavaliers Indiens présente son Wild West Show
à travers toute l’Europe et fait une halte en Arles au début de ce siècle,
les gardians n’étaient que de pauvres vachers en sabots dans une Camargue infestée de moustiques et ignorée de tous.
La rencontre surprenante d’un vieil amoureux de ce dur pays, le marquis Folco de Baroncelli, et de trois Indiens Sioux Oglala du Wild West Show accompagnés d’un jeune aventurier, Joe Hamman, va créer une longue amitié qui produira les premiers westerns muets français réalisés dés 1909
par Joe Hamman et exportés avec succés aux USA -le public américain adorait le réalisme “sauvage” des ambiances camargaises-
comme l’exaltation -en Occitant!- par le marquis des valeurs, selon lui, communes aux “Fils du Soleil” alors qu’il travaillait à la codification de pratiques et nouveaux rituels camargais.

Des Saintes Maries de la mer au plus profond d’une Camargue
toujours sauvage jusqu’à Paris, nous suivront deux indiens contemporains sur la piste de cette épopée singulière où, grâce à l’aide et aux témoignages
du petit-fils du marquis -Pierre Aubanel-
et du fils spirituel et légataire du réalisateur de western -Jacques Nissou-,
nous retrouverons, aujourd’hui, une même passion de la défense d’identités spécifiques -provençale,camargaise..amérindienne- qui, associée à un sacré esprit d’ouverture et.. d’aventures, raconte,
je l’espère, une belle histoire universelle où les traditions ne sont pas que clichés, préjugés et “peur de l’autre”... L’amour commun du cheval aidant
le voyage d’un imaginaire au triple galop!

Tous les contacts et recherches préliminaires au développement de ce sujet ont été menés avec l’aide d’une ethnologue, grande amie de la famille du marquis de Baroncelli, Helga Lomositz.
Nos personnages sont:
-Biregil Kills Straight, cavalier, leader traditionnel Sioux Oglala, petit-fils
d’Iron Tail, membre du Wild West Show et l’un des amis indiens du marquis,
-Richard Ray Whitman, cavalier, acteur, photographe, Yuchi, co-réalisateur
avec moi-même, en 95, d’un portrait de deux communautés marseillaises,
-Pierre Aubanel, gardian, manadier, photographe, petit-fils du marquis
-Jacques Nissou, héritier des collections de Joe Hamman et ethnologue.

 

Le tournage se déroulera l’hiver en Camargue où vit Pierre Aubanel au milieu de ses élevages taurins et chevalins et à Paris dans le véritable musée personnel de Jacques Nissou.

Des sourds surgissements des toros de marais dont les ténébres brumeuses se déchirent
à l’évocation de la codification par le marquis de l’art mouvementé de l’abrivado
et à la démonstration d’un rodéo typiquement camargais récemment créé,
le “Dar-Rodéo”,


nous suivrons indiens et gardians au grand galop sur les traces des tournages de westerns de Joe Hamman (série Buffalo Bill 1909-1910).

Alors, dans les souffles givrés des chevaux rentrant lentement au mas
sous un crépuscule écarlate, aprés avoir comparé les mérites respectifs
des montures ponees et camargaises, ils plaisanteront sur leur patrimoine commun de blue-jeans, de bottes cow-boys et de selles “armée américaine”
Mc Clellan.

Alors, un bon verre à la main, dans une tradition bien partagée
-les lettres d’Iron Tail remerciant le marquis pour ses envois de caisses de Bordeaux au fin fond du Dakota sont savoureuses-
tout en revisitant une trés belle collection d’objets indiens des plaines, à l’égal de celle de John Wayne, offerts par les grand-pères des uns à ceux des autres,
ils parleront de l’héritage, des expériences et des chances qu’ils souhaitent aujourd’hui à leurs enfants... Nouveaux “Fils du Soleil”.

Printemps 1996